VEILLE
Philippe Bouet
Merde ! Le constat débile, un truc à gerber dans les pétunias de ma voisine. De beaux pétunias pourtant… roses ! De ces roses très profonds, proches du turquoise, le genre de couleurs que l’on ne peut voir que chez Irène. D’ailleurs il n’y a pas que la couleur pour nous accueillir, on sait tout de suite que l’on arrive chez Irène, avant même de voir ses pétunias, à cause de l’odeur. A mi-chemin entre l’huître de Lisbonne et le pantalon de papa, cette odeur musquée, persistante, iodée, qui vous rappelle que vous n’êtes pas là par hasard.
Souvent, c’est un rendez-vous manqué qui vous conduit jusqu’ici.
Pour ma part, Irène, j’en ai rien à foutre tout comme de ses pétunias, seuls ses poneys m’intéressent. Elle les aurait rapportés d’un voyage à Funafuti, d’où leurs sabots palmés. Ce genre de bestioles s’acclimate très bien en baignoire et la baignoire d’Irène en accueille un petit troupeau, grappe d’environ 12 kilos.
La curiosité, l’envie poussée à l’obsession m’ont poussé à : tous les matins, durant deux ans savonné les enjoliveurs de la voiture d’Irène à l’huile de mouette pour construire une relation de confiance qui me permette de l’approcher, de lui dire mon intérêt pour les Funiponeys. Qu’enfin j’obtienne d’elle, la garde de ceux-ci pendant ses vacances.
Tout est question de patience.
Je dis ça ! Mais encore faut-il disposer de ses vacances ! Les vacances en salle de bain se comptent en mètre, pour ma part j’en dispose de 12,573 mètres soit 3 jours 7 heures 3 minutes 14 secondes en référentiel Funiponey. Juste le temps nécessaire pour que je les présente à Bartabos dompteur de sarcophage que je connais depuis l’enfance. Bartabos est un véritable autodidacte en matière de dressage, à 4 ans il dressait les moules dans l’évier de la cuisine de ses parents… hop! hop! hop ! Saut périlleux par-dessus le chauffe-eau, à 7 ans il introduisait sa tête dans la coquille d’une noix sauvage type « barcasse », plus tard il arrivait à faire chanter les baleines sur les boîtes de sel !
La coque, l’eau, la mer… vous faites le lien ?
Dormir.
La baignoire 0,7 m3, le chapiteau 254 m2, 15 m sous toiture, 3 litres d’eau un spongiaforme à distorsion, Bartabos et les Funiponeys. Il me faudra convaincre Mme Irène d’endosser le costume d’écuyère que je lui ai fait confectionner par Mme Duplancher.
Vous ai-je parlé de Mme Duplancher ? Pénélope Duplancher qui attend son mari, parti faire un long voyage. Belle femme qui coud, découd et recoud. Pour Irène elle a taillé le patron d’une robe dans une peau de galipote : créature légendaire du folklore vendéen qui, en parade nuptiale, se teinte de vermillon à pois noirs.
Le rose des pétunias dans les cheveux, le costume rouge à pois noirs, le blanc nacré des Funiponeys, les rouflaquettes de Bartabos ...? HOOOO tout doux j’m’emballe... calme.
Debout.
Ils arrivent, d’abord seuls, puis par petits groupes, enfin tel un vol de mouches ronflant attirées par le miel, ils envahissent les gradins.
Ça gueule, ça couine, ça grince, ça se mate, ça se souri, ça s’exprime, ça se fait compatissant, ça critique, ça théorise, ça s’émerveille...du bobo ?
Puis tout à coup les tambours résonnent, le brouhaha s’estompe la lumière baisse, vient le noir, le silence. Et dans un puits de lumière vous apparaissez.
Digne d’une toile de CHAGALL et autre CHALARD, Mme Irène vous êtes magnifique !!!
Les pieds dans la baignoire, les bras tendus vers le ciel vous êtes belle. Bartabos écume, son fouet claque et les Funiponeys, vous….
C’est l’heure.
Merde ! 7 h 30, je vais encore être en retard, m’habiller, pas le temps pour le thé je prendrai un café au bureau. J’ai pas le temps, mais je me brosse quand même les dents, y a un minimum. Je compenserai ce soir en débauchant plus tard. La journée commence bien, j’vous jure !
À 8 h 45, la réunion de service avec démonstration du nouveau logiciel POTOMAC, à 12 h 30 il faudra courir après un repas sur le pouce, à 13 h 30 forum des services civiques avec la Mission Locale. 15 h 30 prendre une voiture pour aller participer à la réunion sur l’accès au logement des jeunes au FJT, retour au bureau à 17 h 30 pour ma commission avec les jeunes jusqu’à 19 heures ( 19 h 10 la brosse à dent). Puis débauche direction le parking, à pied 20 minutes, la voiture, 15 minutes, la maison 20 h 30 à table - « ta journée ?...». Enfin, le canapé je gobe... 22 heures…
Merde il est déjà tard, allez, j’ai rendez-vous avec mon lit et en plus j’ai sommeil…
Réveil 2 h 30 mais putain c’est trop tôt !!... le boulot, les échéances, mon bilan sera-t-il prêt dans les temps, la réservation au service protocole a-t-elle été confirmée ?... fait chier prise de tête, ça tourne... 3 h 30... on n’avance à rien… Au secours Mme Irène!...... Mme Irène ? Pitié, accueillez-moi encore dans une de vos histoires à dormir debout où tout est possible !
Souvent, c’est un rendez-vous manqué qui vous conduit jusqu’ici.
Pour ma part, Irène, j’en ai rien à foutre tout comme de ses pétunias, seuls ses poneys m’intéressent. Elle les aurait rapportés d’un voyage à Funafuti, d’où leurs sabots palmés. Ce genre de bestioles s’acclimate très bien en baignoire et la baignoire d’Irène en accueille un petit troupeau, grappe d’environ 12 kilos.
La curiosité, l’envie poussée à l’obsession m’ont poussé à : tous les matins, durant deux ans savonné les enjoliveurs de la voiture d’Irène à l’huile de mouette pour construire une relation de confiance qui me permette de l’approcher, de lui dire mon intérêt pour les Funiponeys. Qu’enfin j’obtienne d’elle, la garde de ceux-ci pendant ses vacances.
Tout est question de patience.
Je dis ça ! Mais encore faut-il disposer de ses vacances ! Les vacances en salle de bain se comptent en mètre, pour ma part j’en dispose de 12,573 mètres soit 3 jours 7 heures 3 minutes 14 secondes en référentiel Funiponey. Juste le temps nécessaire pour que je les présente à Bartabos dompteur de sarcophage que je connais depuis l’enfance. Bartabos est un véritable autodidacte en matière de dressage, à 4 ans il dressait les moules dans l’évier de la cuisine de ses parents… hop! hop! hop ! Saut périlleux par-dessus le chauffe-eau, à 7 ans il introduisait sa tête dans la coquille d’une noix sauvage type « barcasse », plus tard il arrivait à faire chanter les baleines sur les boîtes de sel !
La coque, l’eau, la mer… vous faites le lien ?
Dormir.
La baignoire 0,7 m3, le chapiteau 254 m2, 15 m sous toiture, 3 litres d’eau un spongiaforme à distorsion, Bartabos et les Funiponeys. Il me faudra convaincre Mme Irène d’endosser le costume d’écuyère que je lui ai fait confectionner par Mme Duplancher.
Vous ai-je parlé de Mme Duplancher ? Pénélope Duplancher qui attend son mari, parti faire un long voyage. Belle femme qui coud, découd et recoud. Pour Irène elle a taillé le patron d’une robe dans une peau de galipote : créature légendaire du folklore vendéen qui, en parade nuptiale, se teinte de vermillon à pois noirs.
Le rose des pétunias dans les cheveux, le costume rouge à pois noirs, le blanc nacré des Funiponeys, les rouflaquettes de Bartabos ...? HOOOO tout doux j’m’emballe... calme.
Debout.
Ils arrivent, d’abord seuls, puis par petits groupes, enfin tel un vol de mouches ronflant attirées par le miel, ils envahissent les gradins.
Ça gueule, ça couine, ça grince, ça se mate, ça se souri, ça s’exprime, ça se fait compatissant, ça critique, ça théorise, ça s’émerveille...du bobo ?
Puis tout à coup les tambours résonnent, le brouhaha s’estompe la lumière baisse, vient le noir, le silence. Et dans un puits de lumière vous apparaissez.
Digne d’une toile de CHAGALL et autre CHALARD, Mme Irène vous êtes magnifique !!!
Les pieds dans la baignoire, les bras tendus vers le ciel vous êtes belle. Bartabos écume, son fouet claque et les Funiponeys, vous….
C’est l’heure.
Merde ! 7 h 30, je vais encore être en retard, m’habiller, pas le temps pour le thé je prendrai un café au bureau. J’ai pas le temps, mais je me brosse quand même les dents, y a un minimum. Je compenserai ce soir en débauchant plus tard. La journée commence bien, j’vous jure !
À 8 h 45, la réunion de service avec démonstration du nouveau logiciel POTOMAC, à 12 h 30 il faudra courir après un repas sur le pouce, à 13 h 30 forum des services civiques avec la Mission Locale. 15 h 30 prendre une voiture pour aller participer à la réunion sur l’accès au logement des jeunes au FJT, retour au bureau à 17 h 30 pour ma commission avec les jeunes jusqu’à 19 heures ( 19 h 10 la brosse à dent). Puis débauche direction le parking, à pied 20 minutes, la voiture, 15 minutes, la maison 20 h 30 à table - « ta journée ?...». Enfin, le canapé je gobe... 22 heures…
Merde il est déjà tard, allez, j’ai rendez-vous avec mon lit et en plus j’ai sommeil…
Réveil 2 h 30 mais putain c’est trop tôt !!... le boulot, les échéances, mon bilan sera-t-il prêt dans les temps, la réservation au service protocole a-t-elle été confirmée ?... fait chier prise de tête, ça tourne... 3 h 30... on n’avance à rien… Au secours Mme Irène!...... Mme Irène ? Pitié, accueillez-moi encore dans une de vos histoires à dormir debout où tout est possible !